Les Indiens Zuñi sont l'une des 19 Tribus qui occupaient autrefois le Nouveau-Mexique. On dit qu’ils proviennent d'un peuple qui vivait au même endroit il y a plus de 1000 ans, avant la venue des Européens. Ce peuple, les Anasazi, était une grande société qui détenait de larges territoires et rassemblait des civilisations et des cultures distinctes. Les Zuñi seraient les descendants directs des Anasazi.
Les Zuñi actuels (environ 6000) descendent des habitants des sept villes Zuni découvertes en 1539 par le missionnaire franciscain Marcos de Niza et appelées par les Espagnols les Sept Cités de Cíbola (un des mythes de l’eldorado). De Niza rapporta que les Zuni possédaient des richesses fabuleuses, et en 1540, l'explorateur Espagnol Francisco Vásquez de Coronado conduisit une expédition militaire contre les Sept Cités. Il les conquit mais ne trouva aucun trésor. Une mission chrétienne s'établit parmi eux en 1629, mais les Zuñis après plusieurs révoltes, conservèrent leur religion traditionnelle. Leur territoire est à peu près de la taille de l'État de Rhode Island
Plusieurs anthropologues établissent un lien entre les Indiens Zuñi et les autres tribus pueblos dispersées dans toute la région du Sud-Ouest (du continent américain). En tout cas, ils sont aujourd'hui uniques car leur langue n'est parlée que par eux et ne ressemble pas aux langues des tribus voisines.
Ils vivent principalement dans le pueblo Zuñi au Nouveau-Mexique. Quant à ceux qui vivent hors de la ville, sur l'ensemble du territoire, ils sont peu nombreux et sont éloignés les uns des autres. Ils ont su se protéger en ne prenant pas parti aux problèmes qui ne les concernaient pas. Grâce à cette neutralité dans les guerres et les conflits, ils ont pu rester autonomes et résister aux changements qui s'opéraient autour d'eux.
S'il n'est pas rare de trouver la religion en bonne place dans les tribus indiennes, ça l'est beaucoup plus de voir les femmes jouer un rôle important. Elles sont considérées par les Zuñi comme la vie de la tribu. Les hommes chassent, construisent, pourvoient aux besoins de première nécessité, mais le tout(en particulier la maison) appartient aux femmes. Ce sont elles qui commercent et qui s'occupent des finances.
La mythologie des Zuñi, ne peut pas avoir la fixité d'un récit écrit. Elle est transmise et conservée par la tradition orale, et les gens qu'on peut interroger n'en donnent pas tous exactement les mêmes versions. Cependant, seuls les détails varient. Dans l'ensemble, cette mythologie est bien définie, malgré sa grande complexité.
Les Zuñis croient que les hommes ont un principe spirituel(âme) et que cette âme, après la mort, reste d'abord quelque temps à errer dans le village, où elle est un danger pour les vivants, puis s'en va résider sous les eaux, dans le pays des dieux katchinas et des morts, au village mythique de Kothluwalawa. Seuls les membres de certaines prêtrises ou confréries font exception à cette règle et habitent, après leur mort, dans un autre village mythique non loin du premier, où ils mènent d'ailleurs le même genre d'existence.
Malgré une peur de la sorcellerie (une des causes de la mort)on ne trouve pas chez les Zuñis la notion d'un principe du mal. Les Zuñis craignent certains dieux considérés comme dangereux, mais ils n'ont pas de terreur d’ordre cosmique .
Selon la mythologie, la terre a la forme d'un disque entouré par les eaux. Sous la terre, qui comporte elle-même différents mondes étages, un système de cours d'eau relie entre eux les quatre océans qui sont autour du disque terrestre. C'est sur les bords des océans, dans les lacs, au fond des rivières, que vivent presque tous les « dieux », à l'exception des divinités astrales. L'eau joue un rôle primordial dans la religion de ce peuple d'agriculteurs pour qui la pluie est la condition de toute richesse, et la sécheresse le plus grand fléau.
L'univers, dans la conception générale des Zuñis, est rituellement divisé en sept régions ou directions qui sont, dans leur ordre hiérarchique : le nord, l'ouest, le sud, l'est, le Zénith (le haut), le Nadir (le bas) et le milieu (Itiwana). En fait, ce n'est pas généralement le nombre sept qui domine ce système, mais plutôt le nombre six, car le milieu est pris à part, il sert plutôt de point de départ et c'est autour de lui que l'univers apparaît comme divisé en six régions Cette classificationse retrouve dans le rituel. Les Zuñis se sont efforcés aussi de faire coïncider avec elle la liste des clans qui composent la tribu d’où l’hypothèse d’un totémisme originel (répartition des clans en catégories, associées chacune à une direction. Cette répartition des clans est fondée sur des associations d'idées tout à fait empiriques. Par exemple, le clan de l'ours et celui du coyote (aujourd'hui éteint) sont rattachés à l'ouest parce que le pelage de l'ours est de la couleur de la nuit et parce que le coyote crie pendant la nuit ; c'est à l'ouest que le soleil se couche lorsque tombe la nuit.
Il est posssible que cette classification fut inventée par les Zuñis pour faire coïncider artificiellement la structure sociale de leur tribu avec un système cosmologique et religieux. Mais elle ne correspond nullement à une répartition géographique réelle des clans. La hiérarchie des six directions (nord, ouest, sud, est, Zénith et Nadir) joue un rôle extrêmement important dans toute la religion. A chaque région est associée une couleur. Ainsi, le jaune est la couleur du nord, le bleu celle de l'ouest, le rouge celle du sud, le blanc celle de l'est, le Zénith est multicolore comme l'arc-en-ciel et le Nadir est noir comme les profondeurs de la terre. Cette .répartition des couleurs se reflète dans le choix des ornements du culte. D'autres concepts sont également classés suivant les six directions. Par exemple, on rattache au nord, le vent, l'air, l'hiver, la guerre. A l'ouest sont associés l'eau, le printemps, la guérison, la chasse. Le sud est la région du feu, de l'été, de l'agriculture et de la médecine. La terre, l'automne, la magie et la religion appartiennent à l'est. Quant au Zénith et au Nadir, ils sont dans un rapport assez mal défini avec ces divisions. En fait, dans certains cas, le haut et le bas occupent une place à part et l'on ne retient alors qu'une classification entre les quatre points cardinaux. Le chiffre quatre, chez tous les Indiens pueblos, a une valeur sacrée. Il est le chiffre « de la vérité ». Beaucoup d'éléments rituels doivent être répétés quatre fois. Certaines cérémonies n'ont lieu que tous les quatre ans.
La mythologie zuni comporte une véritable genèse.
Au commencement était le principe suprême, le Père de toutes choses, le créateur, nommé Awonawilona. Par la puissance de sa propre pensée, il se fit Soleil (Yato-kya). Mais le soleil, forme visible d'Awonawilona, ne voulut pas rester ainsi solitaire. Il créa d'abord les nuages, la pluie, les eaux. Puis il fit naître deux personnages, l'un masculin et l'autre féminin, nommés Shiwanni et Shiwanokia( Gardien et Gardienne). Le premier, en crachant sur sa main et en soufflant dessus, fit des bulles brillantes qui devinrent les étoiles. Shiwanokia dit alors : « Regarde ce que je peux faire à mon tour ». Elle cracha dans sa main et souffla dessus, faisant ainsi une bulle qui devint la Terre. Ainsi, outre le Soleil qui est notre Père à tous, il y eut la Terre, notre Mère, qui est de nature chaude et féminine, et qui se trouvait au milieu des eaux, sous le ciel étoile, qui est de nature froide et masculine. La Terre-Mère (Awitelintsita) était à l'origine molle et malléable. Elle contenait en elle-même quatre matrices étagées en profondeur, la première étant située en haut, à la surface. C'est dans la quatrième matrice, ou quatrième monde terrestre, tout à fait au fond, que furent créés les hommes, par la toute puissance du Soleil. Ils vivaient là dans les ténèbres, encore informes, entassés les uns sur les autres, mais ils ne tardèrent pas à s'organiser, à avoir des prêtres possédant des fétiches.
c'est l'histoire de l'émergence des créatures humaines, à partir de la quatrième matrice de la terre jusqu'à la surface, qui constitue la partie la plus importante du mythe de la création. La création varie selon certains récits souvent imprécis. On a soupçonné d'ailleurs que la conception d'un Dieu créateur du Soleil, puis, directement ou indirectement des Eaux, du Ciel, de la Terre et de tous les Êtres, a été influencée, sinon inspirée par la tradition catholique apportée par les missionnaires espagnols.
Par contre, la mythologie de l'émergence à partir du monde souterrain semble bien être proprement indienne. Elle n'est d'ailleurs pas, dans ses traits essentiels, particulière aux Zuñis, mais répandue chez tous les Pueblos, et aussi dans d'autres tribus de cultures très différentes, comme par exemple les Apaches et les Navahos. Ceux-ci font de l'histoire de l'émergence un récit un peu différent ; mais ils racontent, en tout cas, que les hommes furent créés dans un monde souterrain et eurent à franchir plusieurs étapes avant de parvenir à la surface et à la lumière.(cf article sur la mythologie hopi)
Alors que les hommes vivaient dans les ténèbres du quatrième monde, l'un d'eux, le plus sage de tous, nommé Poshaiyanki, réussit à trouver un chemin pour monter jusqu'au troisième monde, puis au second et enfin à la surface. Il s'adressa alors au soleil et lui dit qu'il serait bon de faire venir tous les hommes à la lumière, car ils pourraient ainsi rendre hommage au créateur. Le Soleil pensa qu'en effet il serait bon que ses enfants, les humains, pussent le voir et lui donner des offrandes. Il décida donc d'exaucer la prière de Poshaiyanki.
Pour cela, il créa d'abord deux êtres divins en fécondant de ses rayons l'écume des eaux. Ces deux jumeaux, ses fils, nommés Kowituma et Watusi, montèrent jusqu'à lui sur une route de farine. Le soleil leur dit : « Mes fils, allez dans la quatrième matrice de la terre ; vous y verrez les hommes, avec leurs prêtres. Amenez-les à la surface de la terre, à la lumière de votre Père, le Soleil, afin qu'ils puissent lui rendre hommage et lui faire des offrandes. » Les deux fils du Soleil, les jumeaux divins, descendirent donc jusque dans les profondeurs du quatrième monde, et, là, ils virent les hommes. Et leur demandèrent s'ils voulaient sortir de ce séjour obscur et parvenir à la lumière de leur Père, le Soleil. Les hommes acceptèrent avec joie. Alors les jumeaux divins, fils du Soleil, jetèrent de la farine qui se transforma en lumière, puis ils plantèrent un arbre qui servit d'échelle aux hommes pour monter jusqu'au troisième monde. Ils restèrent là quatre années. Après que ce temps se fut écoulé, les êtres divins jetèrent de la farine, plantèrent un autre arbre, et les hommes purent parvenir au second monde, où ils passèrent encore quatre ans. Enfin, par le même procédé, les zunis arrivèrent au monde supérieur, à la surface de la terre. Les hommes, sortant de leurs séjours souterrains, n'étaient pas tels qu'ils sont aujourd'hui : ils étaient tout noirs ; leur peau avait la consistance de la boue et ils avaient des queues comme les animaux. Quand ils virent leur Père le Soleil pour la première fois, ils furent d'abord aveuglés par son éclat et leurs yeux pleurèrent, et leurs larmes, en tombant sur le sol, se transformèrent en fleurs. Les jumeaux divins éduquèrent les Ashiwis, qui étaient très ignorants ; ils leur enseignèrent l'art d'allumer du feu par le frottement d'un bâton et l'art de cuire les aliments. Puis ils choisirent parmi eux un des hommes les plus sages, qui se nommait Yanoluha, et le proclamèrent prêtre du Soleil et en même temps prêtre du Zénith.
Les récits mythologiques décrivent longuement des séries simultanées d'événements qui s'entrecroisent et alternent selon un ordre variable. D'une part, on raconte comment furent instituées, soit par les jumeaux divins ou d'autres dieux, soit par des héros civilisateurs, les diverses organisations sociales et religieuses de la tribu les clans, les prêtrises, les confréries, 'autre part, les mythes rendent compte en même temps des migrations des Zuñis. Ceux-ci, partant de leur premier établissement à Awisho, se mirent à la recherche du Centre du Monde, et, avant de le trouver, fondèrent des villages en différents endroits. Les jumeaux divins les accompagnaient toujours. Ils eurent, en chemin, de nombreuses aventures
Un chapitre essentiel de la mythologie zuni concerne l'origine des dieux masqués.
C'est au cours des migrations avant la découverte du milieu du monde que se produisirent les événements dont la conséquence fut la création des dieux masqués ou Katchinas.
Il arriva d'abord qu'un jour les Zuñis, las de toujours changer de place et n'arrivant pas à trouver le centre du monde, décidèrent, pour faciliter les recherches, d'envoyer quelqu'un en éclaireur. Le prêtre du nord envoya son fils et sa fille.
« Les deux enfants grimpèrent en haut d'une montagne, et la fille, soudain somnolente, s'allongea sous un peuplier de Virginie pour se reposer. Son frère continua ses recherches dans les environs, et lorsqu'il revint, vers midi, il trouva sa sœur profondément endormie. Une brise légère souleva sa jupe, et le garçon, ensorcelé, s'allongea à côté d'elle, la caressa, et dormit avec elle.
Quand, en se réveillant, la fille réalisa ce qui s'était passé, elle se mit très en colère, s'arracha les cheveux, se frappa le visage et la tête qui devinrent tout bosselés. Elle hurla tant que ses lèvres se mirent à enfler. Elle pleura jusqu'à ce qu'autour de ses paupières se forment des cercles gonflés et fripés, très disgracieux. Elle bredouilla de façon inintelligible jusqu'à ce que son frère, de façon inattendue, commence à la comprendre, et leur langage changea.
Et leur langage ayant changé, le garçon dit à sa sœur : « II n'est pas bon pour nous de rester seuls. Nous devons préparer un endroit pour les autres. » II descendit de la montagne et traîna ses pieds dans le sable, créant les rivières Zuni et Little Colorado. A l'endroit où elles confluèrent, un lac se forma, dans les profondeurs duquel prit naissance Kolhuwalaawe [le village des katchinas], le pays des morts.
Cette nuit-là, la fille mit au monde dix fils ; tous sauf le premier furent stériles et, comme elle, difformes. Chacun d'entre eux avait un trait de caractère distinctif et un cadeau sacré à offrir à l'espèce humaine.
Molanhakto, un minuscule piège à lapin pendant au lobe de son oreille droite, apportait une courge. Le Bavard, un rêveur qui parlait rarement, et toujours avec irrévérence, apportait du maïs jaune. Grand Prêtre Guerrier, un poltron, du maïs bleu. Chauve-souris, qui était vêtu d'une couverture noire et craignait l'obscurité mais voyait parfaitement bien le jour, du maïs rouge. Petite Corne, qui se croyait invisible, du maïs blanc. Petite Bouche le mélancolique, qui bafouillait et jacassait sans arrêt, du maïs sucré. Vieux Mâle, sémillant et gloussant pour un rien comme une jeune fille, du maïs noir. Gardien du Gibier, vêtu d'une robe de femme, du maïs moucheté. Buveur d'Eau, toujours assoiffé, apportait sa calebasse d'eau. Et Vieux Jeune Homme, l'égocentrique, le conseiller irréfléchi du groupe, avait à offrir la clairvoyance, enfermée dans les minuscules craquelures du maïs grillé. »
Barbara tedlock rituel et pouvoirs.avec les indiens zunis
Ils forment donc le groupe des dix Koyemshis, (clowns sacrés)que les Indiens, lorsqu'ils s'expriment en anglais, appellent « mudheads », c'est-à-dire « têtes couvertes de boue », et qui sont, les plus importants des dieux masqués. d’autres s’y ajoutent comme des enfants perdus et tombés à l’eau devenus être surnaturels . il furent trouvés à Kothluwalawa (village katchina)où ils vivent comme des dieux sous la direction d'autres dieux masqués plus importants, nommés prêtres katchinas, les chefs de cette Société. Avec les Koyemshis et les chefs des dieux masqués, ils forment le groupe des Katchinas. A vrai dire, il n'est pas exact de les appeler des dieux. Ce sont des êtres surnaturels qui servent d'intermédiaires entre les hommes et le Soleil, qui est le Dieu suprême.
Les zunis emploient le mot KOKO pour désigner les dieux masqués. Il correspond au mot Katchina employé par la plupart des Indiens pueblos, et en particulier par les Hopis. le mot Koko s'emploie parfois dans un sens plus restreint pour désigner spécialement les enfants perdus transformés en demi-dieux et formant une foule plus ou moins anonyme. On les nomme aussi globalement les Bons Kokos) mais, dans le sens large, le terme Koko s'applique à tous les dieux masqués, c'est-à-dire à la fois aux Kokokshis et aux prêtres Katchinas, y compris les Koyemshis.
ce culte des katchinas est l'élément le plus spectaculaire de la religion des Zuñis, comme aussi de toutes les autres tribus d'Indiens pueblos..
Le mythe raconte que les enfants perdus et transformés en Kokos (ou Katchinas) prirent l'habitude de quitter fréquemment leur village pour aller, sous la conduite de leurs chefs et prêtres, visiter les vivants, les distraire par leur danse et amener avec eux dans le pays la pluie et la fertilité. Les zunis étaient réconfortés par ces danses, mais, malheureusement, après chaque visite, les Katchinas emmenaient avec eux des gens à Kothluwalawa, qui est à la fois le séjour des dieux masqués et des morts. Selon une autre tradition, c'était la beauté des Katchinas qui séduisait les femmes zunis et, quand ces dieux rentraient chez eux, il y avait toujours des femmes qui les suivaient sous les eaux. Certains récits disent seulement que les filles, émerveillées par la beauté des dieux, ne voulaient plus épouser les simples mortels. Enfin, d'autres prétendent que c'étaient les Katchinas eux-mêmes qui entraînaient quelques vivants dans la demeure des morts. En tout cas, pour une raison ou pour une autre, les visites des dieux masqués, bienfaisantes en elles-mêmes, avaient des conséquences néfastes pour les Zuñi. Les Katchinas, voyant que le peuple était affligé par les malheurs qu'ils provoquaient en allant à Zuni, décidèrent de n'y plus venir en personne. Afin que leur heureuse influence pût cependant se faire sentir et amener la fertilité, ils convinrent qu'à l'avenir ils iraient en esprit chez les vivants. A cet effet, ils demandèrent aux indiens de fabriquer des masques semblables à ceux qu'ils portaient eux-mêmes à Kothluwalawa. Au cours des fêtes, certains Zunis revêtiraient ces masques
Ses consignes turent bien entendu suivies, et c'est cet usage des masques qui se perpétue encore dans le rituel des Zunis. Les fêtes Shalako, par exemple, sont une de ces cérémonies où l'on voit des hommes personnifier les dieux Katchinas en portant leurs masques. En réalité, ils sont censés faire plus que les représenter, puisque les dieux sont présents dans les masques. Les Katchinas, pour venir à Zuni, lors des cérémonies de ce genre, et y être présents, en esprit, font le voyage sous la forme de canards invisibles. Lorsque les Zunis veulent que les dieux viennent danser, ils leur envoient des bâtons à plumes pour; leur faire connaître ce désir.
Outre l’origine totémique et clanique de la mythologie, on a fait l’hypothèse de son rapport aux migrations. Elle broderait sur le thème réel des déplacements de la tribu avant son arrivée dans le territoire où elle est maintenant fixée.
Cela est confirmé par certains documents archéologiques.
durant la période appelée Pueblo III et qui s'étend du Xe au XIe siècle, les ancêtres des Indiens pueblos vivaient dans de grands villages tels que Chaco Canyon et Mesa Verde. Vers la fin de cette période et plus précisément dans les dernières années du Xe siècle, toutes ces grandes agglomérations furent abandonnées. On s’interroge encore sur les causes de cet événement. Quelle force poussa les Indiens à fuir leurs cités ? Les actions guerrières des Navahos et des Apaches ont pu contraindre, ça et là, les habitants à chercher au loin des territoires moins menacés. Mais il est probable qu'une cause plus générale a contribué aussi à disperser les Indiens pueblos en rendant impossible leur existence dans les grands villages. Tout porte à croire que la raison principale de leur exode fut une série d'années désastreuses pour l'agriculture. La sécheresse prolongée, rendant inutilisables les canaux d'irrigation, amena la famine. Les Indiens pueblos, ne trouvant plus sur place de quoi nourrir une population importante concentrée en de vastes agglomérations, durent se fractionner en petits groupes et partirent à la recherche de nouvelles terres. En ce qui concerne les Zuñis, telle fut probablement l'origine de la migration de l'élément purement pueblo qui vint se mêler à quelques clans venus du sud-ouest, du pays des Salados, pour former la tribu Zuni en lui apportant l'essentiel de la civilisation pueblo.Ce métissage explique d’ailleurs certains aspects du culte : les zunis ont une pensée de l’ordre et de l’harmonie, pourtant ils introduisent certains éléments dangereux comme l’ours animal chamanique ou les clowns sacrés à qui tout est permis dans la dérision..Le chamanisme, présent dans leur culture, peut s’expliquer aussi par ce métissage.
On peut tirer une conclusion analogue de la mythologie des Hopis. Ceux-ci, en effet, racontent que les premiers Katchinas apparurent aux hommes au cours d'une période de grande sécheresse et de famine, alors que les Hopis étaient déjà installés sur les mesas qu'ils occupent actuellement. C'est à ce moment seulement que les dieux masqués se montrèrent et enseignèrent à la tribu les rites qui mirent fin à la sécheresse
« On peut donc admettre qu'au cours de ces migrations, à partir des régions de Mesa Verde, Aztec, Tyuonyi, les tribus, obsédées par la crainte de la sécheresse, ayant peut-être perdu la confiance dans leurs anciens rites religieux, se trouvaient fort disposées à accueillir et à développer un culte nouveau leur permettant d'agir directement sur des êtres surnaturels capables de provoquer la pluie et représentant la pluie d'une certaine manière. C'est un fait bien connu que les périodes de crise sont souvent l'occasion d'une évolution religieuse. Le mythe qui met en relation l'apparition des premiers Katchinas avec une période de famine prend ainsi tout son sens. Il est la transposition d'un événement historique, à savoir l'élaboration du culte katchina au cours des migrations d'un peuple chassé de ses villages par la disette mais qui conservant son unité clanique assimila un culte rencontré avec celui de ses ancêtres claniques ; D'où cette confusion que l'on observe dans les croyances entre les ancêtres, les morts, les Katchinas, la pluie, les nuages. D'où, également, l'identité de nom entre certains clans et certains Katchinas.
Puisqu'on ne peut présenter autre chose qu'une hypothèse, nous pouvons, conformément aux indications de la mythologie et aux rares indices tirés de l'archéologie, supposer que le culte katchina fut une modification des anciens cultes claniques (peut-être totémiques), une évolution de la religion ancestrale des clans vers la représentation, par des masques, d'êtres surnaturels contrôlant la chute des pluies et constituant, tout comme les morts et les ancêtres, une sacralisation de la tradition clanique. Nous pouvons admettre que cette évolution religieuse prit naissance vers la fin du xne siècle, à un moment où les Indiens pueblos, poussés par la famine, abandonnaient leurs grands villages et se dirigeaient, au cours de longues migrations, vers les pays qu'ils occupent aujourd'hui, et où ils s'amalgamèrent parfois à d'autres groupes ayant une autre origine. » Jean cazeneuve. les indiens zunis
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