ESPACES DE CULTURES ,ANTHROPOLOGIE,PHILOSOPHIE,VOYAGES...
SUIVEURS DE PISTES,DE SAISONS ,LEVEURS DE CAMPEMENTS DANS LE PETIT VENT DE L'AUBE ; Ô CHERCHEURS DE POINTS D'EAU SUR L'ECORCE DU MONDE. Ô CHERCHEURS,Ô TROUVEURS DE RAISONS POUR S'EN ALLER AILLEURS"...
SAINT JOHN PERSE .ANABASE.
D'après STEPHEN WATSON : LE CHANT DES BUSHMEN /XAM
Puisque nous sommes dans le solstice d'hiver, phénomène astronomique mais aussi anthropologique, occasion de multiples fêtes et de cultes agraires, (la Nativité chrétienne, Saint-Lucie en Suède, les mystères de Mithra, les cultes d'Harpocrate, les Saturnales romains, les mystères d'Orphée, le Dévayana hindou), il est bon d'entendre la poésie sidérale des /Xam (appelés autrefois Bochimans, puis Bushmen, avant de se nommer eux-mêmes San).
Ces peuples parmi les plus anciens d'Afrique, auteurs de peintures et gravures rupestres qu'on trouve un peu partout, sont parmi les derniers à parler des langues à « clics » (orthographiés par le signe /).Tout au long de leur histoire mouvementée, ils avaient su développer une culture de chasseurs /cueilleurs, étroitement adaptée à un environnement hostile.
Considérés comme infra-humains aux 19ème siècles , méprisés et refoulés par les populations noires mais surtout « chassés » au sens propre par les Treckboers, leur culture a pratiquement disparu avec la sédentarisation.. Les derniers groupes de chasseurs cueilleurs, réfugiés dans une réserve du Kalahari risquent encore d'en être expulsés ; ayant trouvé des filons de diamants sur la réserve, le gouvernement du Botswana leur avait coupé l'eau pour les reloger de force, avant de reculer devant l'action internationale.
Leur poésie cosmique et chamanique qui a pratiquement disparu de leur mémoire a été heureusement recueillie par des auteurs sud-africains dont le traducteur Stephen Watson. A noter que celui-ci utilise notre terminologie astronomique pour faciliter la compréhension
Le chamanisme :
Il était de notre famille, l'homme qu'on appelait //Kunn.
C'était un homme de pluie ; il fabriquait la pluie.
IL créait les cheveux de la pluie, ceux qui tombent
doucement.
Il créait les jambes de la pluie, quand elle tombe en
colonnes.
Il invoquait la nuée, ce sorcier de la pluie.
//Kunn appelait la pluie, elle arrivait de l'ouest.
Quand il vivait au nord, Bochiman des montagnes,
la pluie venait de l'ouest et tournait vers le nord.
//Kunn savait faire la pluie, il savait l'orienter
vers le pays qu'il habitait, dans les montagnes.
Il était l'un des nôtres, ce sorcier de la pluie.
Mais il vivait au nord, et nous vivions à l'est.
Ni son père ni sa mère ne m'étaient connus.
//Kunn était déjà vieux quand j'étais enfant.
Il était très vieux alors. Il est mort depuis longtemps.
Il ne danse plus à la poursuite de la bête de pluie.
Son cœur ne plonge plus dans les trous d'eau profonde,
pour chercher le taureau de pluie qui tient la pluie dans son sillage.
Il ne le conduit plus dans les plaines brûlées,
éparpillant sa chair son sang son lait, pour qu'ils deviennent pluie.
C'est le dernier que j'aie connu, ce sorcier de la pluie
. C'est le tout dernier, l'homme qu'on appelait //Kunn,
lui qui créait la pluie, et l'odeur de la pluie,
ce magicien de l'eau et du parfum de l'herbe,
Magicien des cheveux de la pluie, maître de la nuée
.
Prière à la nouvelle lune :
Lune qui te lèves, qui reviens nouvelle
, prends mon visage, ma vie, avec toi,
rends-moi le jeune visage, le tien,
le visage vivant, qui se lève renouvelé :
Ô lune, donne-moi le visage avec lequel tu renais de la mort.
Lune à jamais perdue pour moi,
et jamais perdue car tu reviens ; sois pour moi ce que tu fus jadis et
que je sois à ton image :
Donne-moi le visage, ô lune, qu'après ta mort tu renouvelles.
Lune, quand tu es nouvelle tu nous dis
que tout ce qui meurt doit renaître ; ton visage qui renaît me dit
que mon visage, s'il meurt, vivra :
Ô lune, donne-moi le visage
que toi, par ta mort, renouvelles !
Chez nous, quand paraît Canope, on appelle un enfant :
« Apporte-nous du bois, la branche là-bas ;
enflammons-la en l'approchant du feu,
pointons sa flamme vers Sirius, l'étoile. »
Chez nous, les /Xam, on dit à qui la voit paraître :
« 11 faut prendre un bâton, pointer vers elle sa flamme,
pour que le soleil sorte et rayonne pour nous,
que Sirius l'étoile n'ait pas froid en sortant,
et produise le riz des Bushmen, et l'espoir de manger
demain. »
Le premier qui la voit s'en va dire à son fils :
« Donne-moi ce bâton, celui que tu vois là,
j'en enflammerai le bout pour le pointer vers Sirius,
je dirigerai sa flamme ainsi, vers Sirius,
tout en priant pour qu'elle se lève comme Canope. »
Et il prend le brandon apporté par son fils.
11 fait voler les flammes en les pointant vers Sirius,
tout en priant, pour qu'elle brille autant que l'autre.
Il chante. Il chante Canope, il chante Sirius,
pointant le feu pour qu'elles brillent d'un même éclat.
11 brandit le bâton, lance le feu vers les étoiles.
Puis rompu par l'effort, son bois réduit en cendres,
il s'allonge épuisé, son vêtement de peau sur la tête.
11 a lutté pour attirer Sirius dans la chaleur solaire,
lutté dur pour que l'étoile n'ait pas froid en sortant,
que les femmes puissent bientôt sortir, pour chercher le riz
des Bushmen,
comme on les voit sortir à présent ,
le soleil sur les épaules.
Le soleil, la lune et le couteau :
La lune est encore pleine, encore vivante,
suspendue dans le ciel avant l'aube du jour.
Dès que le soleil descend vers l'ouest,
la lune à l'est grandit de plus en plus,
elle monte dans le ciel, son visage se dore,
son ventre arrondi est plein d'enfants de lune,
elle traverse le ciel d'un bord à l'autre,
elle escalade la nuit depuis son quartier est,
elle vient s'accrocher là, énorme, toujours pleine et vivante,
elle brille à l'ouest avant le point du jour.
Et dès que le soleil se lève à l'est,
son pouvoir s'étend sur toute la terre.
D'un trait rapide il perce la lune dans sa chair ;
elle si pleine, si lumineuse, si vivante,
elle qui sait parler, il faut maintenant qu'elle crie :
« Soleil, épargne mes enfants, ne les touche pas !
Tu poignardes avant leur naissance mes enfants de lune.
La lame de ta lumière perce à mort notre lumière.
Laisse-les vivre ! Et moi lune, laisse-moi rayonner ! »
C'est ainsi qu'elle crie, encore pleine dans le ciel,
encore vivante à l'aube, avant de se mettre à pâlir.
On entend fuser son cri d'appel, on l'entend protester
à l'aube de chaque jour quand le soleil se lève
et saisit son couteau pour tuer les enfants de lune.
Elle pousse alors un cri, un cri si déchirant
qu'il brise presque la lame du premier rayon.
Chaque jour elle crie, « Soleil, épargne mes enfants !
Ne les fais pas mourir ! » Alors le jour se lève.
Le chant de l'étoile du Cœur de l'Aube(Jupiter)
Parce que nous sommes étoiles
nous devons parcourir le ciel,
nous, étoiles toutes deux,
choses du ciel.
Mais notre mère Lynx,
est chose de la terre,
elle doit parcourir la terre, dormir sur le sol nu.
Mais nous, qui sommes étoiles,
nous ne devons pas dormir,
nous devons parcourir le ciel sans dormir, éveillées.
Parce que nous sommes étoiles,
parce que nous parcourons le ciel,
nous devons tourner sans fin, sans repos, sans sommeil.
Les videos sont des JOÏKS ,CHANT TRADITIONNEL ¨SÂMES
En ces temps de solstice, il est bon d'écouter « Le Conte de la piste écarlate », selon les légendes orales Sâmes(lapons). D'après Mariusz WILK. DANS LES PAS DU RENNE. S'y dessine le Cosmos chamanique.
A chacun d'en garder le sens.
Notre conte remonte aux temps les plus reculés, comme un rêve à l'état de veille qui erre fantomatique dans la mémoire. C'est une borne kilométrique dans le brouillard de notre lointaine errance.
Je le raconterai avec mes propres mots, et pourtant, je devrais employer ceux avec lesquels nos ancêtres l'ont chanté. Autrefois, chaque mot était musique, mais les miens naissent prose. C'est qu'aujourd'hui, hélas, un mot se dit : il ne se chante pas.
Prêtez donc l'oreille à notre conte.
« Avez-vous jamais entendu la musique de la mer? Le chant des glaces ? Vous ne l'avez jamais entendu... Pourtant les glaceschantent, chantent en vérité. Chantent dans la nuit d'hiver quand la mer gèle, et au printemps quand la mer dégèle. Il n'est pas donné à tout le monde d'entendre la mélodie de la glace.
Loin, derrière la mer du Nord, dort notre Seigneur. Un grand vieillard sous la forme d'un Morse. Quand il se retourne dans son lit d'un côté ou de l'autre, la glace se met à chanter. Pour que les hommes sachent que le Vieillard est toujours envie.
C'est lui qui envoie vers nos rivages des bancs de harengs et de merlus, de morues et de limandes. Il rabat le saumon dans nos rivières et lâche le corégone dans nos lacs. Lui, notre père nourricier, conduit vers nous les phoques et les autres animaux marins. C'est lui quijette sur la côte des baleines grasses. Il nous a donné la longue nuit polaire pour que l'homme se repose, et le renne, et le poisson sous la glace. C'est lui aussi qui répand sur le ciel du Nord les faisceaux de l'aurore boréale pour qu'ils mènent dans les ténèbres un combat terrible. Ainsi, les esprits des ancêtres jouent avec les destinées des vivants, traçant des sentiers écarlates dans les cieux. Et Naïnas les commande.
C'est lui, le grand chef Naïnas, avec son épouse Nikiïa, qui sera le héros de notre conte.
Cependant, il faut commencer par l'autre bout. Il faut commencer le récit à partir du Soleil.
Le Soleil a pour monture le matin un ours, à midi un renne mâle et le soir une vajenka. Le Soleil est donc venu depuis l'autre côté de la mer, il a renvoyé la vajenka, il est entré dans la maison, il s'est fait homme. Il voulait se reposer, dormir un peu, et voilà que son fils, Péïvalké, vint à son père et dit :
-Je veux me marier.
-Je ne dis pas non, répondit le Soleil. Marie-toi, fils, puisque tu le veux.
- Comment pourraisje me marier, père, puisque sur la Terre, il n'est pas possible de trouver une fiancée? Mes pantoufles ne vont à aucune jeune fille. Elles ont les pieds trop lourds. Avec
une telle femme, on ne peut vivre dans le ciel. On s'enracinerait plutôt sur terre avec elle.
- C'est vrai, c'est vrai, dit le Soleil, chagrin.
Péïvalké s'inclina devant son père, le Soleil, et lui demanda :
- Cherche-moi une épouse dont le pied sera à la mesure des pantoufles dorées, à visage humain et au corps pâle comme un rayon de lune, afin que personne ne sache, pour ma tranquillité, si elle existe ou si elle n'existe pas.
- Tu me charges d'une tâche difficile, fils. Si tu choisis pour épouse une fille qui n'est pas de notre sang, elle brûlera, l'infortunée. Pourtant... un instant... Cela me revient, j'en connais une pareille. J'ignore seulement si elle est assez mûre pour prendre un époux. Bon, je vais essayer de te trouver une fiancée, prends patience. Couche-toi et dors jusqu'à ce que je te réveille.
Péïvalké se coucha et s'endormit profondément, afin que tout soit accompli comme il le désirait quand il serait éveillé.
Le Soleil attendit un jour où la Lune sortait dans le ciel bleu. De loin, tout était pour le mieux. Dans sa pénombre, on voyait comme l'ombre d'une jeune fille : tantôt elle était là, tantôt non... Le Soleil s'approcha et dit :
-J'ai entendu dire, voisine, que tu avais une fille charmante ; j'ai un fils pour elle. Il est temps de les marier.
- Comment as-tu appris, compère, l'existence de ma fille, demanda la Lune, alors que je ne sais pas moi-même avec certitude si elle existe ou non ? Je crois la tenir dans mes bras... ma toute petite. Je sens son souffle. Mon cœur frémit. Mais vraiment, je ne sais pas.
Et la Lune serra son enfant sur son sein. Le Soleil vérifia d'un doigt, là, quelque chose gazouilla.
- Peu importe qu'elle soit si petite ; chez nous, elle deviendra un beau brin de fille. Auprès de nous, tout grandit. Même ce qui n'existe pas naît.
La Lune sourit.
- Tu essaies de me tromper, compère : chez vous, elle flambera.
- C'est toi qui triches : tu dis que tu la tiens dans tes bras, alors que tu ne sais pas si elle existe ou non.
Le Soleil se pencha.
- Où est-elle ?
-Je t'interdis!... cria la Lune. Tu lui fais mal. Elle n'est pas pour vous ! Elle est destinée à un autre, à celui qui aux confins du ciel brille très faiblement et papillote à ras de terre.
Le Soleil se fâcha :
- Comment oses-tu comparer mon fils à quelque clarté éva-nescente ! Notre lumière, c'est la vie, et non un pâle papillon-nement.
- Ne te fâche pas, voisin, ta force n'est forte qu'à moitié et ta puissance n'est qu'une demi-puissance. Et au crépuscule ? Et la nuit? Où la chercher en hiver? Lui, il est puissant au crépuscule et pendant la nuit, en hiver comme en été. Lui et moi vivons d'une lumière commune. Par conséquent, ne te glorifie pas, vieillard, de tes forces.
Pour le Soleil, c'en était déjà trop. Il cracha une telle bouffée de chaleur que la mer déborda, que la terre trembla et se souleva jusqu'à former les montagnes.
Les eaux stagnantes, les ténèbres des forêts et toute l'armée des ombres, les faisceaux de l'aurore boréale en tête, se lancèrent au secours de la Lune.
Les créatures vivantes étaient divisées : les oiseaux, les rennes et les chèvres prirent parti pour le Soleil, les bêtes sauvages se rangèrent derrière la Lune.
Et par-dessus tout, le tonnerre se déchaîna dans le ciel.
L'épouvante tomba sur les hommes.
Le Vieillard sous la forme d'un Morse s'éveilla (ne demande pas son nom, mieux vaut ne pas le prononcer), vit tout ce désordre, bâilla et fit descendre la nuit sur la Terre.
Les choses commencèrent à se remettre en ordre tout doucement; elles n'étaient pas à la même place qu'avant, mais en revanche, tout retrouva son calme.
Seul l'ours flaira une bonne affaire, ne se déclarant ni pour le Soleil ni pour la Lune. Il se mit à l'affût dans l'ombre, saisit le tonnerre par la barbe, le fourra dans un sac et le traîna chez lui où il l'enferma dans le hangar, la porte cadenassée; ensuite, il s'assit, et il est toujours assis. Il regarde, attendant de voir ce qui va se passer.
Dans la nuit, le silence tomba. Tous finirent par revenir à la raison et rentrèrent chacun chez soi, pour vaquer à leurs affaires. Le Soleil revint à la raison. La Lune revint à la raison.
- Rien ne sert de se quereller, commère, il faut s'entendre. Tu as dit toi-même que tu ne savais pas s'il y avait une jeune fille ou s'il n'y en avait pas. Comment quelqu'un qui n'existe pas pourrait-il être destiné à qui que ce soit ? Sans mon accord, cela n'aboutira à rien.
La Lune devint toute triste :
- Apparemment, tel est notre destin. Tourner craintivement autour de toi.
- Donne-moi ta fillette-qui-n'existe-pas, dit le Soleil en riant, et, ma parole, elle deviendra une beauté, plus belle que les baies du framboisier sauvage.
- Bien, mais promets-moi que tu lui permettras de garder notre clair-obscur.
- Qu'il en soit ainsi, commère ; d'accord pour votre clair-obscur, pourvu qu'elle obéisse à nos lois.
Ils chuchotèrent encore pendant un certain temps, se mettant d'accord sur les détails. Ils se dirent au revoir et le Soleil se hâta de rattraper le jour….
PLUS TARD ET DANS UN AUTRE MONDE.
Un vieillard solitaire, suite à rêve, découvrit une île et une jeune femme qu'il épousa. Heureux, ils s'installèrent puis trouvèrent plus tard une « fille dans une ombre » qu'ils nommèrent Nikiïa, « l'Ombre de Celle qui N'est pas » : elle leur apporta bonheur et prospérité.
« - Partons, dit la Jeune Fille.
Elle le précéda dans la forêt. Le vieillard trottinait derrière elle. Ils entrèrent dans une aulnaie. Là, ils s'arrêtèrent. Ils restèrent longtemps silencieux. Elle finit par demander :
- Tu vois ?
Le vieillard dit qu'il voyait. Mais il ne savait pas ce qu'il voyait. C'est-à-dire que le vieillard ne savait pas si ce qu'il voyait était ou n'était pas.
- Et l'ombre, tu vois? L'ombre sur un aulne? -Je vois, mais qu'est-ce qui jette une ombre?
- Là, il n'y a rien, rien que l'ombre.
Et en vérité, la Nouvelle Lune et la Lune jouaient, jusqu'à ce qu'il fît clair et qu'une tache de lumière apparût sur le tronc de l'aulne, et dans la tache, l'ombre d'une tête d'enfant. De ses yeux, elle regarda le vieillard. Voilà des menottes, voilà des petons. Elle tendit ses menottes : prenez-moi.
La Jeune Fille pressa cette pelote vivante contre sa poitrine. C'était une toute petite fille aux yeux clairs. Elle brillait tout entière des rayons de la Lune. Soudain, elle se mit à pleurer comme un enfant des hommes. La Jeune Fille la berça et l'enveloppa chaudement dans la peau de castor.
La Nouvelle Lune et la Lune se cachèrent derrière les confins du monde…… »
« …..Depuis lors, il y eut toujours de la lumière sur leur île. En toute saison de l'année, quel que soit le temps, que le ciel soit partout caché sous une épaisse couverture, que l'hiver ait tapissé le monde de neige et le gel figé la forêt, ou que l'automne pleurât de ses pluies, les rayons d'un ciel serein se déversaient sur l'île du vieillard et de la vieille. Dans la journée, le Soleil éclairait, et la nuit, la Lune veillait; quand ni le Soleil ni la Lune n'avaient le temps, ils priaient le Grand Vieillard sous la forme d'un Morse d'envoyer le fidèle Naïnas faire sa ronde avec un détachement de faisceaux d'aurore boréale. Les faisceaux se lançaient dans leur combat et éclairaient le ciel au-dessus de l'île de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Comme dans une fenêtre verte au milieu d'un désert sombre et glacé - grâce aux sources chaudes de la Terre, l'île était chaude et fleurie comme au printemps -, sur le tapis coloré des mousses et des buissons d'airelles et de myrtilles, s'ébattait la petite Akkaniïda, fille de la Lune argentée, nommée Nikiïa, c'est-à-dire L'Ombre-De-Celle-Qui-N'est-Pas.. »
Un jour, le vieillard brava pourtant les interdits et ramassa des écorces de bouleau dans une forêt maudite ; il fut alors possédé par un esprit de la nature malfaisant et ses enfants, qu'il dut ramener chez lui et servir, épuisant ses forces et ses ressources pour nourrir leur faim insatiable. Il finit par être dévoré par eux ainsi que sa femme puis Nikiia,du moins son apparence humaine parce qu'on ne peut dévorer une ombre. Celle-ci devint une ombre errante qui « n'existait pas » mais finit par rencontrer Naïnas, le faiseur d'aurores boréales. Ils s'aimèrent et s'accouplèrent et Naîmias l'envoya chez sa mère par la « piste écarlate. ».
« La piste écarlate la conduisit à travers des montagnes et des forêts, au bord de rivières et de lacs, parmi des pins et des sapins barbus de mousse, sur le lichen moelleux et des pierres aiguës, et à travers des ravins lugubres tapissés de neiges éternelles, où des chutes d'eau figées par le gel en cascades tantôt bleues, tantôt vertes surplombaient les rochers et les crevasses.
Tout ce qui vivait allait à sa rencontre et cherchait à l'attirer à soi de toutes les manières. Les oiseaux l'invitaient par leur chant, les souris par un sifflement aigu, les lièvres par le tam-bourinement de leurs pattes sur la terre, et l'ours par son grognement la vantait d'être plus belle que les framboises des marais. Les pins et les sapins centenaires s'inclinaient devant elle, l'incitaient à se reposer dans leur ombre, l'arc-en-ciel se pliait pour qu'elle vienne le voir et même le fils du Soleil accourut, étincela et lui baisa la main de sa lumière. Nikiïa résista à l'arc-en-ciel et ne prêta pas attention à Péïvalké; elle veillait seulement à ne pas perdre la trace écarlate de son époux Naïnas. Et la piste courait toujours, de plus en plus loin.
Elle finit par atteindre la rivière. Elle vit une tour sur l'autre rive et chanta la chanson de Naïnas. La mère de Naïnas, entendant que la femme proche du cœur de son fils était arrivée, vint elle-même la chercher en barque et lui fit traverser la rivière. En chemin, elle demanda :
- Qui es-tu ?
-Je suis l'épouse de Naïnas, Nikiïa. Je n'existe pas. Fais-nous un lit dans la petite pièce.
Une telle réponse étonna la mère de Naïnas, mais elle ne dit rien. Elle fit un lit pour le jeune couple dans la petite pièce, comme Nikiïa le lui avait demandé. Dès lors, chaque soir, à peine le crépuscule commençait-il que Naïnas apparaissait sous forme humaine, mais il disparaissait au premier rayon de l'aurore. À la lumière du jour, il n'avait pas le droit de fréquenter les gens dans un corps humain.
Un jour qu'elle revenait de la source, portant des seaux d'eau avec une palanche, Nikiïa rencontra la mère de Naïnas.
-Ah, ma chère, se plaignit la vieille, il semble que je suis sa mère, mais je n'ai jamais vu mon fils. À peine l'aurore pointe-t-elle qu'il est déjà parti ; pendant la journée, je n'ai pas le droit de prononcer son nom chéri, et la nuit, je l'entends venir te retrouver, mais je ne le vois pas. Aide-moi à le voir.
- Moi, je suis Nikiïa, je n'existe pas.
- Mais moi, je suis sa mère. Est-il juste que tu le prennes toutes les nuits dans tes bras, et que moi, je ne puisse pas le voir, ne serait-ce qu'une fois?
-Ton sort est pénible, mère, j'essaierai de t'aider. Je tisserai une ceinture d'étoiles, sombre comme un ciel nocturne. J'en couvrirai l'entrée de notre petite pièce pour que les rayons du Soleil ne puissent regarder à l'intérieur. Quand ton fils s'éveillera, il croira que la nuit dure encore. Alors, tu le verras.
Toute la nuit, Nikiïa tissa la ceinture, et elle cousit dessus des étoiles avec des fils d'or et d'argent, et aux approches du matin, avant le lever de l'aurore, elle suspendit un ciel obscur au-dessus de la tête de Naïnas ; elle alla chercher de l'eau, laissant son époux dans la chaleur du lit. Naïnas se réveilla plusieurs fois, et voyant les étoiles clignoter dans le ciel de la nuit, il se rendormit.
Cependant, le Soleil était monté haut dans le ciel.
Ne pouvant attendre Nikiïa, la mère de Naïnas écarta un peu la ceinture étoilée pour regarder son fils. Le rayon du Soleil n'attendait que cela. Naïnas se leva en sursaut de son lit bien chaud, se précipita d'un côté, se jeta de l'autre, et enfin sauta dehors. Et là, le Soleil le rattrapa... La mère ne verrait plus son fils. À ses yeux, il était devenu une ombre. Nikiïa revenait juste avec l'eau; elle jeta son seau pour couvrir son époux de sa poitrine. Le Soleil la saisit par les cheveux et, la brûlant, l'enleva dans la nue. Elle cria, appela son époux au secours. En vain ! Le Soleil finit par prendre pitié et déposa l'infortunée dans le sein de la Lune.
Regarde la Lune, tu vois une ombre sur elle? C'est l'épouse de Naïnas, Nikiïa. L'Ombre-De-Celle-Qui-N'est-Pas. La tisseuse du ciel étoilé.
Les carnavals masqués , continuent à rendre hommage aux mythes anciens un peu partout . Habillé sous forme de chèvre, de diable, d’ours ou de monstre avec mâchoire en acier, « l’homme sauvage » appartient au monde de ces mythes.
Le photographe Français Charles Freger découvre le Krampus ) à Salzburg lors d’une mascarade. - créature démoniaque, née dans des pays comme l’Autriche, la Bulgarie ou la Slovénie. Fasciné par la rencontre, il se mit à la recherche des divers figures du mythe dans une chasse photographique à travers, ce qu’il appelle « l’Europe tribale ».
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